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Mother Nature et Apple

Rédacteur Thierry SALOMON
Résumé Subtil et créatif chef d'oeuvre de greenwashing publicitaire, Mother Nature débarque en contrôleuse pointilleuse du "net zero carbone" dans la dernière pub d'Apple !
Une pub-récit aussi géniale que la fameuse pub d'Apple pour le lancement du premier Mac, où l'entreprise californienne s’érigeait - en 1984 ! - en féminine Spartacus armée du Mac contre un futur Orwellien.
Mais cette fois-ci, le récit est volontairement sobre, écologie oblige : Un lieu unique, une salle de réunion assez banale mais lumineuse et un seul et minimaliste effet spécial dans les toutes dernières secondes.
Petit essai de décryptage ...
Billet Visionnez la pub avant lecture de ce billet (sous-titres en français). : sur YouTube ou sur le site d'Apple


Cette longue pub (5'17) est construite comme un récit, ou plutôt un conte. Et comme dans tout bonne histoire, il y a deux héros que tout au départ oppose : une femme noire symbolisant Mother Nature (la Nature est diversité) aux formes épanouies (la Nature est généreuse). Elle se révèle comptable impitoyable de nos dégâts écologiques (pour elle les lois de la Nature sont indépassables sous peine de déficits, donc de faillite). Mais la Nature saura nous remercier de notre écoute et de nos actions : son sourire final est bienveillant.

Le second héros est le PDG d'Apple, Tim Cook en personne, qui joue son propre rôle. Un patron modeste au milieu de son équipe et non en haut d'une tour panoramique. Grand patron puissant mais petit garçon tremblant face à Mother Nature. Humble mais responsable. Le message est clair : Tim Cook est l'anti Elon Musk.

Et comme dans toute bonne histoire les moments de tension alternent avec des moments drôles, voire vraiment géniaux : Henry David Thoreau en assistant de Mère Nature, il fallait oser !

Juste quelques secondes sur les produits nouveaux Apple, 3 montres connectées, premiers produits "net zero carbon". Juste un regard sur leur écrin, telles des précieux bijoux : inutile d'en dire plus, le désir implique le mystère et la découverte.

Bien sûr tout devrait opposer ces deux héros, la gentille Gaïa et le méchant patron d'une Gafam.
Ils se jaugent du regard à la fin du récit - sept très longues secondes, un duel de fin de western mais sans armes. Bien sûr ils ne vont pas aller jusqu'au baiser final hollywoodien (!) mais ils se quittent sur un contrat moral bien plus sérieux : Mother Nature accorde sa confiance à Tim, Tim s'engage auprès de Mother Nature qu'Apple et lui mettront tout en œuvre pour la mériter. Et Apple sauvera la Terre.

Enfin , tout conte digne de ce nom ayant une morale, la plante verte desséchée hativement planquée de Mère Nature au tout début de la réunion ressuscite, un message subtilement repris dans le logo final ... où une petite feuille noire (le charbon, le pétrole) laisse place sur le pomme d'Apple à un vert printanier. Celui de la petite feuille verte du logo Apple arc-en-ciel original :

image Logos_Apple.jpg (11.1kB)

La boucle est ainsi bouclée : Apple a combattu la terrifiante tromperie (TRUMperie ...) du message orwellien de 1984 : "La guerre c’est la paix - La liberté c’est l’esclavage - L’ignorance c’est la force".
Puis, 40 ans plus tard, ayant généreusement donné la puissance informatique à des milliards d'humains, Apple combat un autre risque systémique, les bouleversements du climat. Sans renoncer aux plaisirs addictifs du consumérisme et des merveilleux objets numériques inutiles.

Chapeau les créatifs d'Apple : un chef d’œuvre de green-washing, allant, subtile astuce, jusqu'à dénoncer le ... green-washing : "Tout le monde veut planter des arbres !" réplique sèchement Mother Nature à qui il ne faut pas la faire, ni lui expliquer la photosynthèse !

Un conte, ou plutôt un tour de magie qui nous fait croire que le seul but de l'entreprise Apple est le fameux "net zero carbone" et non ses profits. Exit ses 3000 milliards de dollars de première capitalisation mondiale et ses hallucinantes marges bénéficiaires.

Un conte faussement moral, qui nous démontre aussi que la multiplication des objets hyper-techno et connectés pourra se faire sans altérer la Nature, donc en accroissant les chiffres d'affaire.
Un récit qui ne dit rien, évidemment, de ce qui serait une vraie révolution : un PC facilement réparable, auto-configurable exactement selon ses besoins, facilement évolutif, réduisant ainsi l’obsolescence, les matières premières, la consommation d'énergie ... et les marges bénéficiaires.